Polémique sur la maternité

Peut-on tenir un blog de maman et garder le cas Elisabeth Badinter sous clé, faire l’impasse sur le sujet. Ni vu ni connu, pas de polémique ?

N’écoutant que mon devoir, j’ai dévoré « Le conflit » d’Elisabeth Badinter, ouvrage qui délie les langues au sujet de la maternité. Que les unes brûleraient bien volontiers sur l’autel du maternage intensif, sur lequel les autres se prosterneraient plutôt, au nom d’un nouveau féminisme.

Alors qu’est-ce que j’en pense ?

Elisabeth Badinter est philosophe. Elle mouline les tendances du présent pour en décrypter les évolutions à venir. Elle ne fustige rien, elle prévient, met en garde prônant avant tout la liberté de la femme à ne pas être qu’une mère allaitante, maternante, se méfie de tout prosélytisme, s’interroge sur l’avenir : et si la somme de nos actes individuels débouchait sur une dictature du maternage, un dénigrement de la « mère corbeau’ à l’allemande, un accroissement des femmes childless (plutôt ne pas avoir d’enfant que d’en supporter les contraintes croissantes). Tout cela est fouillé, documenté et finalement bien positif : pour beaucoup de femmes, la maternité n’est plus l’accomplissement de la féminité. A nous, d’inventer la façon de materner qui nous convient.

Je suis une femme Elisabeth Badinter parmi tant d’autres :

– parce que j’ai allaité sans plaisir, sans succès, sans en faire des tonnes non plus.
– parce que j’ai donné des petits pots à mes bébés (bio quand même hein !)
– parce que j’ai apprécié de reprendre le travail et une vie sociale après mes grossesses.
– parce que je pense qu’avoir des enfants, c’est drôle, c’est chiant, c’est exaltant, c’est contraignant, c’est éreintant, c’est prenant, c’est coûteux. Et que maintenant que j’ai compris que ça pouvait être tout cela à la fois, les états d’âmes, je les garde pour plus tard.
– parce que je sais qu’au fond, ma liberté n’est que mirage.

Pour mieux cerner la philosophie d’Elisabeth Badinter et les paradoxes de la maternité, je vous conseille « L’Heureux événement » d’Eliette Abecassis, d’ailleurs largement cité dans « Le conflit ». L’ouvrage n’est pas gai mais le tableau qu’il dresse de la maternité a le mérite d’être à 100 lieues de tout ce que l’on peut lire ailleurs. Voici un extrait dans lequel Eliette Abecassis cite… Elisabeth Badinter. Et la boucle est bouclée.

« Puis j’avais lu Elisabeth Badinter. On ne naît pas mère, on le devient. Tout est construit par la société, même la maternité. Au XVII° siècle, les femmes envoyaient leurs nourrissons à la campagne chez la nourrice jusqu’à ce qu’ils reviennent à un âge présentable. Ce n’est qu’avec Rousseau qu’on à commencé à s’intéresser au bébé et à l’allaitement, bien tardivement… Le bébé est une invention de la modernité, il a surgi avec les couches et le savon spécial bébé. Il est devenu force économique en même temps que force psychologique. Une femme peut tout à fait s’accomplir sans avoir d’enfant, l’instinct maternel est un mythe moderne.

J’avais peur. Je n’avais pas la fibre maternelle. »

Je remercie les auteurs pour ces écrits déculpabilisants. Et je finirais en disant qu’être maman, c’est AUSSI du bonheur !